70e régiment d’infanterie Médoc

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Le 70ème régiment d’infanterie ci-devant Médoc :

 

Historique :

 Le 1er juillet 1790, le régiment en entier était en garnison à Béziers[1].

 1791 :

 L’affaire dite de Perpignan émut la France, un complot fut découvert, des projets devinés de quelques officiers royalistes. Les soldats du régiment firent la relation suivante des événements survenus à Perpignan depuis le mois de novembre :

« Le 13 novembre une rixe particulière s’étant élevée entre des bourgeois de différents postes parmi lesquels se trouvoient quelques militaires du 20ème régiment et cette rixe qui duroit depuis quelques heures faisant scène sur la place de La Loge, des officies de Cambrésis vinrent comme au secours de leurs soldats et empêchèrent de mettre ordre à cette querelle qui prenoient quelques extensions. Ces officiers se portèrent ensuite au quartier et crièrent aux Armes et dirent aux soldats qu’on égorgeoit leurs camarades en ville. Le sieur Monjustice commandant ce jour-là le piquet fit sortir la troupe à la hâte. Un semestrier nommé Foucart déjà trop connu par les troubles qu’il excita dans Perpignan l’an passé continua à crier aux armes et à jeter une alarme dans la caserne. Les soldats s’assemblent sur une alarme aussi pressante, chaque officier sans attendre le rassemblement des autres compagnies fit sortir la sienne en confusion sans l’ordre préalable de la Municipalité. Le commandant qui arriva alors au quartier y contint le reste de la troupe. Les différentes compagnies se joignirent à la Loge, où elles se mirent en bataille mais comme cette rixe particulière s’étoit déjà dissipée depuis que les officiers avoient quitté la Loge, la troupe se trouva seule en grande défense contre personne. Cette fausse démarche fit comprendre au soldat qu’on le faisoit servir d’instrument à un complot caché et malgré les soins que prenoient quelques officiers d’entretenir l’animosité il commença à être indifférent sur les agitations que ces derniers ne cessoient d’exciter. Cependant Monsieur Desbordes commandant de ce régiment ayant donné des ordres qui portoient qu’après l’appel du soir nul ne pourroit sortir sans un écrit de sa main, et qu’il supprimoit toutes les permissions, même celles des travailleurs, jusqu’à nouvel ordre, les officiers de leur autorité, en faisoient sortir par troupes et donnoient de l’argent à l’un et à l’autre.

Cela dura jusqu’au 6 décembre, ou vers les 10 heures du matin, un grenadier se battit au sabre avec un bourgeois : celui-ci fut grièvement blessé. Le grenadier se réfugia dans un corps de garde où montoit Cambrésis. Des bourgeois et quelques Gardes Nationaux délibérèrent entr’eux d’aller se saisir de cet homme mais ils ne prirent là-dessus aucune résolution. Les officiers se hâtèrent de monter au quartier où d’ailleurs ils devoient se rendre, mais un peu plus tard pour la parade. Ils crièrent encore aux armes, et vouloient absolument emmener la troupe en ville, pour retirer disoient-ils ce grenadier des mains de la Garde Nationale où sa vie couroit les plus grands risques. Monsieur Desbordes s’y opposa avec la plus grande fermeté et défendit aux soldats de sortir. Ces messieurs alors, après de vives instances, pleins d’humeur, se restraignirent à demander 20 grenadiers armés de leurs sabres pour aller au secours de leur camarade. Monsieur Desbordes s’y refusa avec la même fermeté et sur les murmures de quelques officiers Monsieur Desbordes fut obligé de leur faire sentir qu’ils manquaient eux-mêmes à l’ordre […] Un sergent de grenadiers s’oblige à aller lui-même chercher ce grenadier. […] sur ces entrefaits le grenadier est rentré ramener par son sergent ce qui devoit ramener le calme, mais comme le régiment étoit consigné, plusieurs officiers donnèrent de l’argent dans leurs compagnies pour faire venir du vin en recommandant de bien se divertir. Que le vin ne manqueroit pas. Ils se firent apporter leur diner au quartier […] et tous (les officiers) rentroient toujours avec des nouvelles alarmantes les unes que les autres, ils étoient secondés par de fréquens messagers des chasseurs de Roussillon de tout grade qui confirmoient les alarmes et y ajoutoient mille mensonges incendiaires […] Monsieur Chollet s’étoit rendu au département on lui demanda notre départ, il refusa, on lui donna dit-on 24 heures pour se décider, nouveaux cris de la part des officiers et toujours aux armes. On avoit tellement abusé de ce cri qu’on y faisoit presque plus attention […] La nuit survient pendant ces contestations on se retire dans les chambres et nouvelles cruches de vin d’aller et de venir et l’argent d’être jetés sur les tables pour qu’on s’en fournit autant qu’on en voudroit. L’intention étoit globalement d’enivrer le soldat et de lui monter la tête par des fausses alarmes, tantôt s’étoient des canons qu’on trainoient vers le quartier, tantôt la Garde Nationale qui s’avançoit avec des cordes et des échelles et qui alloit tenter une escalade et milles autres propos […] tous ses périls ne faisoient aucun effet sur les soldats et quelques-uns dirent des officiers qui n’étaient pas loin « Buvons le vin des aristocrates, il est fort bon, et puis nous nous moquerons d’eux ». […] A minuit les officiers vinrent réveiller les soldats en sursaut en leur disant de s’apprêter à marcher à la citadelle avec armes et bagages que le général le leur ordonnoit et les y attendoit […] arrivent dans cet instant une centaine de chasseurs de Roussillon qui joignent leurs instances à celles des officiers que le général les attendoit avec les commandants qui étoient à la citadelle. (Devant la résistance des soldats et le désir d’un ordre écrit du commandant, un officier rapporte cet ordre de Monsieur de Cholet) […] le soldat se retire alors dans sa chambre il est résolument décidé à ne point sortir, cette nouvelle apportée à la citadelle une heure après un contrordre toute la troupe légère étoit lestement disparue. Alors les officiers sentent l’inconséquence des mesures qu’ils avoient prises puisqu’un officier des Chasseurs s’étoit plaint indiscrètement tout haut dans la chambre des grenadiers que le coup étoit manqué en ajoutant Nous agirons bien sans eux. […] 25 d’entre eux et quelques sous-officiers qui d’avance avoient fait transporter leurs effets à la citadelle se retirent ou se réfugient dans cette place, le lendemain 7, le régiment résolu d’envoyer députation à la municipalité pour y déposer les faits de la nuit et assurer les citoyens des dispositions pacifiques du 20ème régiment. […] Lors du départ des chasseurs, qui en avoient reçu le matin l’ordre du ministre à Collioure, 4 officiers, 6 officiers et 4 soldats du détachement du 20ème gagnèrent l’Espagne quand ils surent les nouvelles de Perpignan »[2].

Le régiment se trouvait dans la plus grande agitation et l’un de ces soldats, Pierre Gobert fut arrêté à Toulouse, natif de La Maskete, compagnie de Saint-Amand. Il déclara à propos de sa présence à Toulouse et d’un éventuel congé :

« que se trouvant en détachement à Collioure distant de Perpignan de 4 lieues et ayant appris les troubles arrivés dans cette ville, dans lesquels troubles on lui assure que les officiers sont vivement inculpés ne voulant par ailleurs pas trahir la chose publique, en suivant les ordres qui lui furent donnés, ainsi qu’à ses camarades par ses supérieurs d’aller se joindre au reste du régiment et à leurs camarades des chasseurs du Roussillon pour s’emparer de la citadelle de Perpignan et de là faire feu sur la ville, le dit répondant et quelques autres de ses camarades quittèrent la garnison sans congé, pour n’avoir pas de part à cet affreux complot. Interrogé s’il est parti seul, répond qu’il est parti seul de la garnison. Interrogé s’il a rencontré quelqu’un dans sa route, a répondu qu’il a rencontré trois de ses camarades aux environs de Villefranche que s’étant liés de conversation, ils lui ont appris que le sieur Mougon du Roux, lieutenant ainsi que d’autres dont il ne se rappelle plus les noms étoient en prison, pour avoir engagé ses autres camarades de s’emparer de la citadelle et de faire feu sur la ville […]».

1792 :

Le 1er janvier, le régiment était toujours en garnison à Perpignan. Il comprenait un effectif de 934 hommes.

Le mercredi 7 janvier, l’Assemblée nationale décréta après entendu les différents témoignages qu’il y avait accusation :

« contre les sieurs Cholet lieutenant-général, commandant la 10ème division, du Saillant commandant le 12ème bataillon de Chasseurs, Felix Adhémar, Monjous, Pomaryole, Laroule, Gréard, Siochamp, Blacherel, Lablinière, François Adhémar, Lachesserie, Maselègue, Descorbias, Dulin, Lupé, Mongon, François Monscasties, Duron, Adhémar aîné, Larivière, Pierre Pont-de-Saint-Marcoux, Pargade, Hernaussin, d’Alua, Mongon, Maréchal de Chatté, officiers au 20ème régiment d’infanterie, Chapoulard, sergent audit régiment, Joseph Bonasos homme de loi, Pierre Blandinières ci-devant procureur, Vincent Roxader, François Molinier, François Bertrand, François Baxader, François Conseilles, Laurent Prats, Michel Autiers et Doc fils, Tourneur, citoyens de Perpignan tous détenus en état d’arrestation dans les prisons de Perpignan de la citadelle de ladite ville, depuis le 7 décembre dernier, lesquels sont prévenus d’attentats contre la sécurité générale de l’Etat et seront en conséquence par ordre du pouvoir exécutif transférés devant la Haute Cour nationale d’Orléans […] et approuve la conduite qu’on tenue le sieur Desbordes, lieutenant-colonel du 20ème d’infanterie, les sous-officiers et soldats dudit régiment, qui ont résisté aux suggestions perfides et mensongères de plusieurs officiers, du 70ème régiment d’infanterie, et du détachement du régiment ci-devant de La Fère, artillerie en garnison à Perpignan, les membres du Conseil du département des Pyrénées-Orientales, le Maire, la Municipalité, la Garde nationale, la Gendarmerie nationale et tous les bons citoyens de Perpignan pour prévenir et arrêter de plus grands désordres dans leur ville ».

Le 1er novembre, le 1er bataillon du régiment était dans les rangs de l’armée d’Italie, 3ème division du maréchal de camp Brunet, 5ème brigade[3].

1793 :

 Le 28 février, le 1er bataillon sous les ordres du colonel Sérurier, armée des Alpes, se distingua au combat de Sospello.

Le 5 mars 1793, le 1er bataillon, se trouvait à l’armée d’Italie dans les troupes des camps de la Vallée de la Vésubie, en cantonnement à Levens. Il était alors fort de 878 hommes[4].

Il prit part ensuite au siège de Toulon qui fut repris sur les Anglais à la fin de l’année.

 Embrigadement/amalgame du 1er bataillon :

 1ère formation :

 La 129ème demi-brigade de bataille fut formée au camp des Fourches, le 22 octobre 1793, selon Belhomme et Louis Susanne[5]. Il se composait du 1er bataillon du 70ème, 1er et 2ème de l’Hérault.

 2ème formation :

 Le 15 mars 1796, la 129ème de bataille devint la 32ème demi-brigade de ligne, de l’armée d’Italie.

Historique du 2ème bataillon :

 1792 :

 Le 2ème bataillon était en garnison à Perpignan[6]. Il servit ensuite dans les armées des Pyrénées et Pyrénées-Orientales l’année suivante.

 1793 :

 Il servit à l’armée des Pyrénées-Orientales entre 1793 et 1796.

Le 26 juin, l’armée avait pris position près de Collioure pour protéger cette ville, lorsqu’un corps de 2 000 Espagnols, commandé par don Joachim Oquendo tenta de surprendre le poste retranché de Puing-Oriol qui dominait Collioure. Cette position était défendue par le capitaine Serres du 70e avec 120 grenadiers et deux pièces de canon. La garde avancée fut surprise et refoulée dans les retranchements où les ennemis pénétrèrent à sa suite, mais les assaillants furent à leur tour refoulés grâce à l’énergie du capitaine Serres. Sa troupe électrisée, soutînt plusieurs assauts, brûlant jusqu’à la dernière cartouche et mettant en déroute l’ennemi. Ce dernier laissait sur le terrain 600 tués et un grand nombre de blessés.

Le 1er septembre, il se trouvait en garnison à Port-Vendres[7]. Le 22 septembre, il se distingua à la bataille de Truillas.

 1794 :

 En novembre, il faisait partie de la brigade Robert  avec le 5ème de la Haute-Garonne, 3ème de la Haute-Vienne, 1er de l’Ariège, 4ème du Lot, 1er du Gers, 2ème de la Montagne, 1er des Chasseurs du Vaucluse, 1er des Alpes-Maritimes[8]. Le 19 février 1795 à Llers, le bataillon des Phocéens (Bouches-du-Rhône) fut versé dans les rangs du 2ème bataillon du 70ème régiment d’infanterie.

 Embrigadement/amalgame du 2ème bataillon :

 1ère formation :

 La 130ème demi-brigade de bataille fut formée, le 1er juillet 1795, à Figuières, selon Belhomme[9], le 5 juillet selon Louis Susanne et Digby Smith. Elle se composait du 2ème bataillon du 70ème, et des 4ème et 5ème bataillons de la Haute-Garonne.

 2ème formation :

 La 130ème de bataille devint à l’armée d’Italie, la 4ème demi-brigade de ligne, le 12 mars 1796.

Colonels :

 Hugues-Alexandre-Joseph Meunier, en juillet 1791.

Jean-Mathieu-Philibert Serrurier, en août 1792, futur maréchal de France en 1804.

Portraits :

Autres célébrités issus du régiment, notamment du 1er bataillon du 70ème d’infanterie, Rampon, qui était sergent-major et fit ensuite carrière dans les rangs de la 129ème demi-brigade de bataille, puis la 32ème de ligne pour finir général de Division. Citons encore Duranteau, capitaine en 1792, qui suivit le même parcours et termina général de brigade. Enfin La Plane, lieutenant en 1792, qui suivit le même parcours et termina général de division[10].

Article de Laurent B.

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[1] Journal militaire de 1790.

[2] Journal militaire de 1792.

[3] Chuquet, Dagobert, p. 438 à 440.

[4] Ordre de bataille de la collection Nafziger, armée française d’Italie, le 5 mars 1793.

[5] Date également confirmée par Réunion des officiers, historique du 70e régiment d’infanterie de ligne, p. 7.

[6] Journal Militaire de 1792.

[7] Ordre de bataille de la collection Nafziger, armée des Pyrénées-Orientales, 1er septembre 1793.

[8] Chuquet, Dugommier.

[9] Date confirmée par Réunion des officiers, Historique du 70e régiment d’infanterie, p. 9.

[10] Selon L’histoire régimentaire et divisionnaire de l’armée d’Italie en vertu des ordres du général en Chef Bonaparte par les chefs de Corps ou les Conseils d’administration, 1844, p.208.